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Le Père Peinard dans les Ardennes


Réflecs hebdomadaires d'un gniaf


Le Père Peinard fait sa Une sur les grèves dans les Ardennes



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Mézières : salaison de grévistes

Père Peinard 19 juillet 1891 : A la forge de Mohon y a une grève qui dure depuis un sacré bout de temps.

A ce propos, les camaros sont bougrement à cran contre les commis de bureaux. Ces petits freluquets de rien du tout, font les gommeux, et pour passer comme malins ne trouvent rien de mieux que d'engueuler les grévistes.

Turellement avant de dégueuler leurs sottises ils ont soin de regarder leurs talons, afin de ne pas s'exposer à recevoir en  pleines fesses le ripaton d'un camaro.

Alors, ils ne se gênent pas, foutre ! Pour eux, les grévistes sont des voyous, des ivrognes, des sauvages... Et ils le rabâchent en pleine rue, aussi bien que dans les cafés.

Pauvres ronds de cuir ! Ils se figurent donc être d'une race supérieure ?

Ils feraient mieux d'ouvrir les quinquets et de comprendre qu'on est aussi exploités et aussi esclaves en maniant la plume que la lime.

Mais non ! ces chieurs d'encre veulent frimer aux bourgeois.

Pour ça, ils vont à messe et vêpres, bouffent du pain à cacheter, et se signent quand ils entendent les bons bougres parler de casser la gueule aux curés, en même temps qu'à ces sales vaches d'exploiteurs...

Foutre, voilà que, pour ces pauvres trous du cul de chieurs d'encre, je perd de vue ce que j'allais dégoiser :

Il s'agit des gas d'attaque des Monhon qui, pour des bricoles de grève, sont passés l'autre jour en condamnation.

Quatre ont attrapé quinze jours, et deux autres un mois chacun.

Oh, les gas ont été très carrés, nom de dieu ! Ils se sont bien gardés de nier ce qu'on leur reprochait : "Oui, je l'ai fait, qu'à dit l'un, et je m'en glorifie..."

Et l'autre de rebiffer au président : "Si je ne les ai pas attrapés tous par la gueule, c'est pas mauvaise volonté, c'est que je ne pouvais pas ..."

L'avocat-bêcheur, un nouveau, a fait une sacrée sortie contre tous les socialos, et contre tous les socialos, et tous ceux qui excitent les ouvriers..

Attends, mon salaud, on t'excitera à coups de pied dans le cul !

Le même jour, trois copains et deux bonnes bougresses de Cons la Grandville sont passés en condamnation.

Ils étaient accusés d'avoir tatouillé un lâcheur de la grève : y a pas de mal à ça foutre !

En réalité, voici ce qui s'est passé : le lâcheur qui était allé prendre son travail chez les frères Hénon avait été accompagné de 150 bougres qui le conspuaient d'une riche façon.

Sur les 150, le type en a dénoncé  cinq. Parait que la plus jeune des bonnes bougresses lui a craché à la gueule.

Ca lui valu deux mois de clou. Sa copine a ramassé quinze jours.

Les trois gas ont eu, l'un deux mois; les deux autres, trois mois chacun.

Le rigolo de l'affaire, c'est que l'avocat bêcheur croyait leur faire honte. Savez-vous comment, nom de dieu ?

A l'un il reproche d'avoir déserté...Mais foutre, c'est très chouette de sa part.

A l'autre, il reproche d'avoir fait de la contrebande, d'avoir bouffé quand il avait faim, sans avoir un radis pour payer...Bondieu, mais le zigue est à la hauteur ! Crains rien, quand il sortira du clou, il t'en fera voir d'autres...

Au troisième, il reproche d'avoir été élevé aux frais de l'Etat dans une maison de correction...Bougre d'andouille, avant de le foutre dans cette boîte infecte, fallait lui demander son avis : je parie qu'il aurait préféré être élevé au collège... tu n'aurais pas la maison de correction à lui reprocher.

Ecrit par libertad, à 23:51 dans la rubrique "Les chroniques du Père Peinard".



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