Le Père Peinard dans les Ardennes

Le Père Peinard 10 janvier 1892 : Mézières, 91ème biffin,

Mon vieux Peinard, la lettre que tu as publié sur les pieds de banc de la 23ème, ces rengagés de malheur qui ont du poil plein les pattes, a foutu tout en branle.

Le capiston, qui est moins rosse que ses subalternes a interrogé tous les bleus pour savoir si, oui ou non, on les maltraitait.

Tu penses, pas un n'a bronché ! On aurait tous l'air de tomber de la lune et de ne pas savoir de quoi il était question, crainte de se voir appliquer le système du colon de Reims.

On en coupe pas dans les enquêtes ! En admettant que le capiston y ait été franc jeu, y a d'autres galonnés que lui et le biffin qui casserait du sucre en verrait de dures dans la suite.

Tralala ! Ces enquêtes, c'est plus pour dégotter celui qui t'envoie les tuyaux que pour punir le coupable...

Et tu sais, mon vieux, y a pas qu'à la 23e qu'on reçoit des coups de pieds dans le cul, à la 32e, c'est kif-kif.

As pas peur, y a de la haine au coeur, et le jour que le volcan fera éruption, toutes les nikelées n'iront pas trouer les poitrines ouvrières : l'or attire le plomb.

Un bleu

Voilà ce qui est des bleus !

A ce qu'il me semble, mille charognes.