Mohon : les exploits de Cadot
Père Peinard 13 septembre 1891
La vie est bougrement loin d'être toute rose, pour les ouvriers qui travaillent aux ateliers des forges de la Compagnie de l'Est.
Ils ont pour contre-coup un vieux salop, à moitié fou, et bête comme trois phoques. Et avec ça, une tête à caler des roues à un corbillard.
Ce vieux maboul incapable d'en foutre un coup, veut malgré ça diriger le travail; il lui faut mettre la patte à la besogne qu'il ne pourrait pas, il est adroit de ses mains comme son chien de sa queue.
Què que ça fout, nom de dieu ! il dirige tout de même...
Turellement, il ne ménage pas les amendes, surtout aux bons bougres qui ont le courage de lui faire comprendre que son cabot est plus intelligent que lui.
L'autre jour, pouf ! Ilcolle quarante sous d'amende à un gas, pour une réponse inconvenante. Du coup, il n'a pas dû en rester lourd de sa journée, au pauvre fieu!
Autre chose, on affiche à la porte des ateliers les ouvriers qui ont fauté.
Mais on n'affiche pas tout le monde, y a des privilégiés, comme en toute choses dans la garce de société où il nous faut vivre.
Quand ce vieux birbe de Cadot veut attirer la colère du chien de garde en chef sur un camaro, il le désigne du doigt, en lui disant : "mossieu, celui-là c'est un peinard..."
Ah, nom de dieu, c'est pas pour dire, mais le jour où les gas se révolteront y aura pas besoin qu'on le leur désigne du doigt.
Et, ajoute le camaro qui m'envois la babillarde : Y a pas de pet qu'on lui fasse l'honneur de la fenêtre, comme à Watrin, si on l'envoie dinguer quèque part, ce ne sera guère que dans les chiottes ...